À Phnom Penh, Penh Yom, professeure de danse classique khmère, ajuste avec soin les mouvements de ses jeunes élèves, tout en leur transmettant l’essence d’un art ancestral en danger. Ce ballet royal, vieux de plus de mille ans, se distingue par la délicatesse de ses gestes et la richesse de ses costumes. Malheureusement, ce joyau de la culture cambodgienne, qui a failli disparaître sous le régime des Khmers rouges dans les années 1970, fait face à de nouvelles menaces en raison de la baisse des financements, de l'érosion des lieux de représentation et d’un changement dans les préférences récréatives du public.
Les inscriptions à l'École secondaire des beaux-arts de Phnom Penh diminuent chaque année. De plus en plus d'élèves abandonnent le processus d'apprentissage exigeant, qui s'étale sur neuf ans. Les Khmers rouges de Pol Pot avaient éradiqué presque tous les maîtres de danse, qu'ils considéraient comme des ennemis, marquant ainsi un tournant tragique pour la danse.
Penh Yom, aujourd'hui âgée de 78 ans, a survécu en cachant son art. Après la chute du régime en 1979, elle a rassemblé quelques danseurs pour raviver cette tradition. "Maintenant, je crains que notre héritage ne disparaisse complètement", confie-t-elle. Les élèves, comme Yang Spheaktra, diplômée il y a trois ans, décrivent la formation comme "extrêmement difficile", mais essentielle pour préserver cette culture. "Il faut beaucoup de patience", explique Tola Thina, une élève de 21 ans.
L'UNESCO a inscrit la danse classique khmère au patrimoine culturel immatériel de l'humanité en 2003, affirmant que ses gestes véhiculent des émotions allant de la joie à la colère. Cependant, cette tradition artistique pourrait devenir simplement un spectacle touristique, comme le met en garde l'UNESCO.
Les défis s'accroissent : bien que l'École secondaire des beaux-arts de Phnom Penh forme la nouvelle génération avec plus de 90 professeurs, les logements pour les étudiants ont diminué. Les pressions académiques et financières poussent de nombreux jeunes à abandonner leurs rêves de danse. "Je dois les observer attentivement pour qu'ils deviennent nos héritiers", murmure Hang Sophea, une professeure soucieuse de l'avenir de cet art. À une époque où l’attention des jeunes se détourne vers les smartphones, elle réitère l'importance de préserver cette identité culturelle.
Tola Thina, en dernière année, partage ses performances sur les réseaux sociaux, attirant ainsi de nouveaux adeptes. "Cette culture est magnifique et je désire la préserver", affirme-t-elle. À travers ces récits, la danse classique khmère continue de danser, défiant le temps et les obstacles, mais son avenir dépendra de la passion et de l'engagement des futures générations.







