Après plus de 15 semaines d’audience marquées par des témoignages poignants, le médecin anesthésiste Frédéric Péchier a été reconnu coupable de 30 empoisonnements, dont 12 ayant entraîné la mort, par la cour d’appel de Besançon (Doubs) ce jeudi. Âgé de 53 ans, il a reçu une peine de réclusion criminelle à perpétuité, assortie d'une période de sûreté de 22 ans. Dans un éclair de résistance, son avocat, Ornella Spatafora, a annoncé qu’un appel sera déposé.
Les accusations portées contre lui s'étendent sur une période allant de 2008 à 2017 dans deux cliniques privées de Besançon. Malgré la reconnaissance de sa culpabilité pour les faits reprochés, Péchier a continuellement affirmé son innocence, affirmant être le réel empoisonneur dans les établissements de santé où il a travaillé. Cette position défensive a alimenté le débat sur la responsabilité dans le milieu médical. Des experts tels que le criminologue Alain Bauer ont noté que ce cas soulève des questions profondes sur les biais de confiance envers les professionnels de santé.
« C’est un soulagement, une libération parce que la honte a changé de camp », a commenté Me Stéphane Giuranna, avocat de plusieurs parties civiles, en invoquant la gravité des actes de Péchier, qualifiés par l'accusation de « crimes parmi les plus atroces ». La cour a pris en compte des éléments de preuve complexes, où les jurés ont dû discerner des détails techniques sur les méthodes utilisées par l'accusé pour manipuler les médications des patients, allant jusqu'à polluer des poches de perfusion avec du potassium et des anesthésiques, dans le but délibéré de provoquer des complications fatales.
Des récits déchirants et un procès inoubliable
Le procès a été ponctué de témoignages déchirants de victimes et de leurs proches. Parmi eux, ceux d'un adolescent survivant d'un empoisonnement à l'âge de quatre ans ont particulièrement marqué les esprits. L'intensité dramatique des échanges et la description de la « liste de l'horreur » des victimes ont ému l'audience, renforçant la gravité des accusations. En réponse, Péchier a exprimé des remords, mais cela n'a pas suffi à atténuer la colère des familles touchées.
Le procès a également révélé un profond clivage au sein de l’opinion publique concernant la confiance envers le corps médical, un thème commenté par le sociologue Fabrice Lhomme, qui a souligné que des cas comme celui-ci peuvent avoir des répercussions sur la manière dont les patients perçoivent leurs médecins. Chaque témoignage a contribué à bâtir un tableau sombre de la tragédie humaine engendrée par ces crimes.
Alors que la décision de la cour peut sembler un point final, le chemin judiciaire de Frédéric Péchier est loin d'être terminé avec son appel. Cette saga judiciaire continuera probablement de tenir en haleine l'opinion publique française, déjà très sensible aux affaires criminelles aux implications médicales.
