En Iran, des femmes se dévoilent avec audace, défiant des décennies de restrictions imposées par la République islamique. Depuis l'instauration du voile obligatoire après la révolution de 1979, ces nouvelles images de femmes dansant et bavardant sans foulard étaient impensables jusqu'à récemment.
Ce mouvement amorcé par la colère suscitée par la mort tragique de Mahsa Amini en 2022, détenue pour non-respect du code vestimentaire, continue de s'étendre malgré la forte répression qui a suivi. De plus en plus de femmes, indépendamment de leur âge, arpentent les rues avec les cheveux au vent, certaines optant pour des tenues audacieuses qui laissent entrevoir épaules et jambes, provoquant l'indignation des conservateurs.
Les autorités ont assoupli leur approche, reconnaissant que forcer le respect du hijab pourrait s'avérer contre-productif. Arash Azizi, spécialiste à l'université Yale, note que bien que le régime ait relâché son emprise sur son application stricte, il demeure condamné par ses propres idéaux, n'ayant pas l'intention d'abandonner le principe du port du voile. Comme le souligne Roya Boroumand, directrice de l'ONG Abdorrahman Boroumand, cette dynamique résulte principalement des actions courageuses menées par les femmes iraniennes. Elle affirme, "Ce que nous voyons aujourd'hui est le résultat d'années de désobéissance civile. Ce n'est pas une réforme imposée, mais un mouvement émanant directement des citoyens".
Des manifestations de libération non seulement en intérieur, mais aussi sur les réseaux sociaux, illustrent ce changement sociétal. Récemment vu à Téhéran, des jeunes dansants sans voile lors de l'ouverture d'un centre commercial ont fait le tour du monde des médias, tandis que des supporteurs lors d'un match de football arboraient des foulards en signe de rébellion en faveur de leurs clubs.
Cependant, la résistance à cette tendance ne doit pas être sous-estimée. Le guide suprême, Ali Khamenei, a réaffirmé avec colère l'importance du voile, tandis que des leaders ultraconservateurs ont averti que les répercussions pourraient être sévères. Les agences de renseignement ont également intensifié leurs efforts pour traquer ceux qui encouragent la "déviance" vestimentaire. Gholamhossein Mohseni Ejeï, chef de l'autorité judiciaire, a condamné les réseaux faisant la promotion de ce qu'il considère comme une immoralité.
Les ONG de défense des droits de l'homme, comme Amnesty International, continuent d'alerter sur une intensification de la répression, avec plus de 1.400 exécutions répertoriées cette année. Les minorités, telles que les Baha'ís, font face à une persécution accrue, et des figures comme Narges Mohammadi, prix Nobel de la paix, ont été récemment arrêtées pour avoir exprimé leur mécontentement.
Alors que le paysage sociopolitique iranien évolue, avec des jeunes féministes s'élevant au sein même du système, la question du port du voile reste un sujet de division au sein des dirigeants. Même le président Massoud Pezeshkian a été entendu critiquant l'idée de forcer une femme à porter le voile, contrecarrant certains projets législatifs visant à renforcer les sanctions contre les femmes n'obéissant pas aux règles vestimentaires.
Le changement se trouve donc à un carrefour, où les aspirations à plus de liberté s'opposent à une répression potentiellement plus lourde. Les femmes iraniennes continuent de tracer un chemin épineux vers l'émancipation, mais avec des défis qui restent de taille.







